Christopher Fomunyoh: Paul Biya est responsable de l’inertie

Appel des intellectuels, election presidentielle, role de la diaspora, avenir de la jeunesse...
Le responsable Afrique du NDI s'exprime sur les sujets de l'actualite recente.

Yaounde, le 16 Fevrier 2004 : Qui ne se souvient des fameuses annees de braise consacrant le retour au multipartisme au Cameroun, de l'election presidentielle alors fortement contestee en octobre 1992 qui permirent cependant a Paul Biya de conserver son pouvoir et a John Fru Ndi, alors fringant leader d'un Sdf adule par les foules, de crier au hold-up electoral, a la " victoire volee " ? Dans un contexte politique interne suffisamment electrique, des voix s'etaient elevees de l'exterieur pour denoncer une mascarade electorale. Parmi ces voix, celle du National democratic institute (Ndi), une Ong americaine ayant pignon sur rue dans le monde entier et specialisee dans l'observation des elections dans les pays du tiers monde et dans la mise sur pied des cadres de reflexion et de promotion des libertes individuelles et des droits de l'homme dans ces pays.

Cette Ong est dirigee depuis plusieurs annees pour la region Afrique par Christopher Fomunyoh, produit de l'universite de Yaounde pendant les annees 70 et dont la silhouette longiligne donnait deja des cauchemars aux responsables qui avaient des choses a se reprocher.

Si, a cause de ses fonctions, il passe rarement une semaine a Washington pour le Ndi a ses quartiers generaux, si de maniere generale il est toujours entre deux avions et plusieurs continents, Christopher Fomunyuoh ne rate pas une occasion de prendre des nouvelles politiques du Cameroun ou il a garde de solides attaches. Le fait qu'il soit identifie comme proche des milieux americains n'est pas toujours pour rassurer les autorites au pouvoir a Yaounde qui suivent de pres ses activites au sein de la diaspora camerounaise. Ses avis sur les questions politiques camerounaises, il est vrai, pourraient bien indiquer que l'homme a quelque idee derriere la tete, en ce debut d'annee 2004 qui, comme chacun le sait, sera une annee electorale. Mutations a profite de son sejour au Cameroun courant janvier dernier pour faire le point avec lui, en toute franchise et en toute liberte.

M Christopher Fomunyoh, vous etes le directeur regional du NDI pour l'Afrique, c'est un organisme international base aux Etats Unis et suffisamment connu au Cameroun pour avoir, en son temps, pris part comme observateur aux elections de 1992 avec un rapport fort critique. Vous etes au Cameroun en ce debut d'annee. On est plutot curieux de savoir pourquoi.

C'est d'abord parce que je suis camerounais et vous avez du constater que depuis les quatre dernieres annees, depuis l'an 2000, je viens regulierement au pays. Et jusque-la, certains pensent que je ne viens pas assez souvent et que j'aurai pu m'installer definitivement au pays. Heureusement qu'avec les nouvelles technologies, on peut travailler dans le monde entier tout en etant dans les points les plus recules. Donc, je me suis fait un devoir de venir assez regulierement au pays pour me ressourcer d'abord et ensuite pour mieux connaitre la situation sociopolitique de mon pays et la maitriser, en esperant en tant que camerounais de la nouvelle generation, apporter ma modeste contribution.

Mais vous n'avez pas besoin de technologie nouvelle au moment ou vous vous trouvez au Cameroun, vous tombez sur un dossier important. 200 universitaires camerounais viennent de signer une petition suppliant le president de la Republique de se presenter a la prochaine election.

Il faut avouer qu'en tant que Camerounais et universitaire, je me pose quelques questions. On pouvais s'attendre a ce que les intellectuels attendent de connaitre toutes les candidatures qui voudraient se presenter, qu'ils analysent les differentes plates-formes avant d'endosser le candidat de leur choix. Effectivement, chacun de nous a la liberte d'expression et devrait endosser la responsabilite de son choix. Mais je trouve degoutant que sur la base d'un message a la nation, les intellectuels se laissent entrainer dans ce train de motions. J'aurais pu m'attendre a quelque chose de different. Heureusement que sur les 16 millions d'habitants que nous comptons au Cameroun, sur les milliers d'intellectuels camerounais dans le milieu universitaire et autres, la plus grande majorite a pu garder une certaine hauteur et a pu se distancer de ces habitudes d'une epoque revolue.

Mais les intellectuels prolongent en fait une pratique des motions de soutien repercutees depuis quelques temps par certains elites comme on les appelle ici.

Vous savez qu'il ne faut pas se tromper parce qu'on est tous Camerounais. On ne peut pas avoir la memoire courte. On se souvient du debut des annees 1990 lorsque certains elites et leaders du pays defilaient partout en faveur du maintien du parti unique, en disant non au multipartisme.jusqu'a ce que le president du Rdpc leur rappelle qu'ils devaient se preparer a la competition electorale et politique. Ce qui m'amene a me poser la question de savoir si ces intellectuels pensent reellement que ceux qui gouvernent prennent les decisions de cette envergure sur la base des soi-disant motions de soutien.

En marge de votre envie de vous ressourcer, comment trouvez-vous le climat sociopolitique au Cameroun en ce debut d'annee 2004 ?

Vous savez, avant la fin de l'annee, j'ai fait le tour d'un certain nombre de provinces ; je suis alle meme jusqu'a l'Est. Cette fois-ci, je suis alle dans le grand nord, ce qui m'a permis de discuter avec les leaders politiques, des professionnels, les representants du secteur prive et meme les citoyens a la base . Cela m'a donne l'occasion de cerner au sein des populations camerounaises, une certaine angoisse par rapport a l'annee electorale du fait des frustrations qui existent. En meme temps il y a des aspirations comme la grande majorite des camerounais a qui j'ai parle souhaitent voir un changement positif dans notre pays, qui nous permettra de faire notre chemin pour que la democratie veritable et la bonne gouvernance s'installent dans notre cite.

Alors le changement auquel vous faites allusion, selon les discussions que vous avez eues avec ces gens-la, est-ce celui d'un homme ou simplement un changement de methode de gouvernement ?

Je crois que les deux sont lies parce que meme la personne la mieux intentionnee a la tete d'un systeme qui ne fonctionne pas a la dimension democratique, s'alignerait comme tous les autres. Je peux vous dire qu'a l'interieur de l'equipe gouvernementale il y a des tetes pensantes, des personnes qui reflechissent autrement et qui auraient souhaite faire les choses de maniere differente. Mais seulement, lorsqu'on se trouve dans un systeme qui est difficile a raffiner et a gerer, on s'aligne et on travaille comme les autres. Donc je crois qu'il faut avoir un systeme fiable qui perdure et aussi des hommes integres qui sont determines, qui ont une vision et qui voudraient vraiment apporter le meilleur d'eux-memes.

Mais de maniere tout a fait personnelle, comment voyez-vous l'annee electorale au Cameroun en l'an 2004 ?

Je crois que le Cameroun se trouve a vrai dire a un carrefour en ce moment et dans ce sens, si nous negocions bien le virage, notre pays pourra retrouver une croissance economique et une renaissance politique parce que nous sommes quand meme la 1ere grande puissance dans la sous region de l'Afrique Centrale. Par contre, si nous ratons cette opportunite de faire des elections credibles en 2004, c'est-a-dire des elections dont l'issue sera acceptee par l'ensemble de la population camerounaise, on risque de se retrouver dans une situation difficile comme certains pays freres comme la Cote-d'Ivoire, la Rdc, Madagascar a un moment donne ; ce que je ne souhaite pas pour mon pays. Je me rejouis du fait que la grande majorite des camerounais souhaitent avoir des elections transparentes et credibles pour que la legitimite de celui qui sera elu ne souffre d'aucune contestation.

Mais est-ce qu'en l'etat actuel des choses, on peut penser que ces elections seront transparentes, lorsqu'en novembre dernier, la proposition de loi du Sdf demandant de modifier les pouvoirs de l'Onel qui peut assurer la transparence des elections a ete rejetee et qu'au contraire l'Onel a ete renforcee par une autre loi proposee par le Gouvernement. Dans ces conditions, pensez-vous que ces elections peuvent etre transparentes ?

Vous savez que deja en aout 2001, dans une interview a un de vos confreres j'ai dit que le texte qui portait creation de l'Onel n'accordait pas assez de pouvoirs a ses membres afin qu'ils aient un impact reel sur l'organisation des elections. Ces jours-ci je constate que le Ministre de l'Administration territoriale est en train de se battre quand meme pour susciter un grand interet de la part des populations. J'attendrais une opportunite pour discuter avec lui ou avec ses collaborateurs pour mieux m'informer sur les dispositions qu'il envisage d'entreprendre pour que les Camerounais aient d'abord confiance dans le systeme electoral et ensuite que l'organisation des elections ne souffre d'aucune defaillance.

Vous n'etiez pas au pays, mais avec les nouvelles technologies, vous etes certainement au courant : vous avez suivi le message a la nation du chef de l'Etat en cette fin d'annee. Quels sont vos principaux commentaires par rapport a ce message que certains ont trouve veridique et proche des preoccupations du peuple.

Peut-etre qu'il a ete proche dans le style qui a ete moins arrogant que par le passe, dont plus communicatif. Mais quelque part je n'ai pas retrouve les grandes idees qui devraient donner les grandes orientations a tout le monde parce que le chef de l'Etat, chef de l'executif (on l'a dit), devrait nous permettre de cultiver une grande vision pour la nation, ce que je n'ai pas vu emerger dans ce discours. Deuxiemement, j'ai aussi constate que le discours a fait l'inventaire des domaines dans lesquels beaucoup reste a faire - par exemple la lutte contre la corruption, la lutte contre la pauvrete, la decentralisation, etc. Dans d'autres systemes plus ouverts, le gouvernement aurait pu tirer les consequences de ce constat des defaillances dans son fonctionnement et de rendre son tablier, pourquoi pas ?

Oui, mais il a egalement reconnu que si le systeme ne marche pas, si on ne se developpe pas, ce n'est pas parce qu'on n'a pas d'argent, mais parce qu'au niveau de l'administration, il y a de l'inertie.

Justement il y a un president americain, Harry Truman qui disait que " The bug stops here " pour dire qu'a la fin de la journee c'est lui qui endosse la responsabilite, comme c'est lui qui tire le benefice de ce qui marche bien. C'est pour dire que tout naturellement c'est le chef de l'executif qui endosse la responsabilite en tant que 1er citoyen camerounais. Donc, s'il y a inertie au sein de l'administration, au lieu de la constater tout simplement comme le citoyen ordinaire, je crois que celui a qui la loi fondamentale reserve le pouvoir constitutionnel de gerer l'administration camerounaise devrait tout faire pour que celle-ci retrouve son dynamisme d'antan.

Etant de la diaspora, on est au courant de ce qu'il y a un certain nombre de cercles de reflexion politique qui ont ete mis sur pied aux Etats Unis pour reflechir sur l'avenir du Cameroun en cette annee 2004. Est-ce que vous faites parti de ces cercles et quelles sont les principales idees que vous avez degagees ?

Effectivement ; il faut avouer que je bouge beaucoup, que je passe le gros de mon temps entre deux continents dont l'Amerique du Nord et l'Afrique. Certains sur la place de Washington vous diront que je suis plus regulier au pays qu'a Washington. Il est aussi vrai que je suis en contact avec beaucoup de camerounais dans le milieu professionnel de la diaspora et que de plus en plus en Europe comme aux USA, les Camerounais essaient de se concerter pour voir comment chacun de nous peut apporter sa contribution au developpement politique et economique de notre pays. C'est pour cela que vous avez entendu parler tout recemment d'une concertation au niveau de l'Atlanta. D'autres sont en train de mener une reflexion au niveau de Washington et New York et meme en Europe, en France, en Allemagne, en Belgique. Je crois qu'il y a une faiblesse que nous devons surmonter. C'est le fait que les Camerounais de la diaspora n'ont pas le droit de vote et cela pousse certains a se distancer du pays, a se laisser couper de la realite politique de notre pays, alors qu'on devrait chercher a renforcer a l'avenir cette tendance pour que les Camerounais, ou qu'ils se trouvent, s'interessent a leur pays. Et qu'ils sachent qu'ils ont un role important a jouer et une contribution significative a apporter dans le developpement du pays. Je prendrais l'exemple des pays comme le Mali et le Senegal ou leur citoyens de la diaspora contribuent a la gestion du pays en apportant une contribution reelle sur le plan economique, politique et meme celui des ressources humaines. C'est ce que je souhaite pour le Cameroun et j'espere que d'ici peu, on verra cela se realiser.

Mais M. Fomunyoh, vous parliez tout a l'heure de carrefour, nous sommes fin janvier et l'election aura lieu au plus tard en octobre, peut-etre meme avant. A quel moment allez-vous formaliser une concertation et la presenter ?

Effectivement le temps est un element important dans la mise en ?uvre des reflexions et des recommandations des differents groupes mais il faut aussi reconnaitre que la plupart des camerounais vivant a l'exterieur sont en communication permanente avec les responsables politiques du pays. Je crois qu'au fur et a mesure que les concertations se realisent sur le terrain, ce n'est pas exclus qu'au moment ou celles-ci vont aboutir de maniere concrete, que les concertations des Camerounais a l'exterieur viennent les appuyer dans leur action.

On parle aussi d'une possible candidature unique de l'opposition : vous y croyez, vous encouragez cette candidature unique ? Quel est le niveau de contact en ce moment avec les leaders politiques de l'opposition ?

J'essaye d'entretenir et de garder les relations cordiales avec les leaders politique camerounais toutes tendances confondues. A juger par l'exemple des transitions reussies dans les pays africains comme le Senegal, le Kenya et meme le Madagascar, on ne pourra qu'arriver a la conclusion que ce qu'il faudra pour qu'il y ait un changement veritable au Cameroun, c'est une coalition assez large qui regroupera en son sein non seulement les parties de l'opposition mais aussi ceux qui tout en militant au sein du parti au pouvoir voudraient que les choses changent et que la gestion de la chose publique puisse profiter a l'ensemble des Camerounais. Je ne crois pas qu'il faut des le depart ecarter la participation de tout Camerounais de bonne volonte dans cette demarche. C'est une demarche appreciable aussi dans ce sens qu'elle permet deja de sanitiser un peu le champ politique car au lieu de parler de 100 partis politiques au Cameroun et peut etre d'une dizaine de candidatures, on aura plutot un nombre limite et dont plus facile a gerer y compris au niveau de la gestion des communication et des negociations entre les partis, le ministere qui va organiser les elections et toute autre structure qui interviendra dans le processus electoral. C'est quelque chose a encourager.

Vous etes le directeur regional pour l'Afrique du NDI. Mais en realite vous avez du mal a vous departir de votre qualite de Camerounais. Que repondez-vous a ceux qui pensent que vous etes davantage un activiste politique qu'un politicien actif ?

Vous savez on ne peut pas travailler au NDI sans etre un activiste. Il faut avoir certains ideaux. Il faut quand meme croire a la democratie, a la liberte, aux droits de l'homme et a la bonne gouvernance. Il faut aussi croire qu'une democratie veritable soit la meilleure facon de gerer les ressources humaines et materielles d'un pays ou de la societe. Lorsqu'on a ses idees et qu'on y croit fermement, on ne peut pas s'empecher d'etre activiste. En meme temps je suis Camerounais aussi et le devoir du patriotisme m'oblige a ne vouloir que le meilleur pour mon pays. Cela me parait tout a fait normal et je crois que tous ceux qui aspirent a un pays democrate devrait soutenir et apprecier mon action. Il est vrai que certains africains lorsqu'ils se trouvent de l'autre cote du monde disent au revoir au continent africain et preferent vaquer a leurs occupations individuelles et personnelles. Je crois que ceux parmi nous qui souhaitent apporter leur contribution a notre continent et ceux des Camerounais qui souhaitent apporter leur contribution a notre pays devraient etre vraiment encourages dans ce sens. Cela dit, il est aussi connu de tous que le NDI se donne dans sa mission du soutien a la democratie a travers le monde de maniere non-partisane, ce qui fait que le jour ou je deciderais de m'impliquer directement dans la politique partisane au pays, je me departagerais de ma casquette NDI.

Quel est l'agenda cache derriere votre interet sur la politique camerounaise. Est-ce que vous n'avez pas une ambition personnelle par rapport a la gestion de la cite au Cameroun ?

Vous savez, j'ai l'universite de Yaounde dans les annees 70, j'ai plein d'ancien camarades qui vous diront que meme a cette epoque, j'etais tres actif dans le mouvement estudiantin comme dans les mouvements culturels et associatives de ma province et de mon departement d'origine. Je crois que c'est quelque chose qui me revient de part ma nature. Et comme ambition, je ne peux pas avoir une ambition personnelle qui depasse celle que j'ai pour mon pays le Cameroun. Vous savez, lorsqu'on a vecu dans un pays comme les Etats-Unis, et qu'on a vu la democratie fonctionner avec des institutions fiables, et lorsqu'on traverse le continent africain et qu'on voit les pays comme le Senegal, le Mali, le Ghana, le Benin qui n'ont pas les memes ressources que le Cameroun mais qui essayent de faire leur chemin, alors on ne peut que se battre pour que son pays puisse rayonner sur le plan international et africain. C'est dans ce sens que je cadre toutes mes demarches et toutes mes actions pour que le Cameroun puisse briller. Ce n'est donc pas une question d'ambition personnelle, mais plutot une question d'ambition pour mon pays que notre generation devrait avoir pour qu'ensemble nous puissions travailler pour avoir un Cameroun meilleur.

On vous a suivi il n'y a pas longtemps sur TV5, vous aviez un regard particulierement dur sur les transitions democratiques au Cameroun, en Afrique et sur la maniere dont certains dirigeants africains s'eternisent au pouvoir. Est-ce que ce n'est pas un peu exagere ?

Non, je ne crois pas que c'etait severe parce que comme vous le savez vous aussi, les fonctions presidentielles en Afrique et partout dans le monde, c'est des fonctions qui pesent. Au fur et a mesure qu'on exerce ces fonctions, on est oblige d'etre use au bout d'un certain temps -- c'est la nature humaine et c'est tout a fait normal. La logique me parait toute a fait simple : si on travaille tres bien, on s'use au bout d'un certain temps, et si on ne travaille pas bien ce n'est pas la peine (pour le bonheur des populations qu'on est sense servir) de continuer a exercer la fonction. Dans l'un ou l'autre cas, il y a de fortes raisons de chercher un renouvellement de la classe politique parce que c'est cela qui donne espoir aux generations montantes. Je constate qu'aujourd'hui en Afrique, le phenomene du depart a la retraite volontaire des chefs d'etat est devenu tout a fait normal, ce qui n'etait pas le cas il y a de cela 20 ans quand les chefs d'etats s'eternisaient au pouvoir. Nous avons aujourd'hui pres de 24 anciens chefs d'etat africains qui ont quitte le pouvoir soit volontairement ou bien parce qu'ils ont perdu les elections et ils ont accepte l'issue portant par ce fait une contribution veritable a la democratisation dans leur pays. Ils continuent d'ailleurs de vivre tranquillement et d'etre respectes a travers le monde. Certains de ces personnalites sont mieux respectees aujourd'hui que lorsqu'ils etaient au pouvoir. Je citerais par exemple le president Konare du Mali, Diouf du Senegal, meme Rawlings du Ghana, et bien sur Nelson Mandela d'Afrique du Sud. Je peux aussi citer le president Jimmy Carter aux Etats-Unis qui a servi un mandat mais qui depuis son depart de la Maison Blanche a apporte une contribution vraiment humanitaire enorme a travers le monde notamment en Afrique. Il vient d'ailleurs de gagner le prix Nobel, ce qu'il n'aurait pas pu faire s'il etait reste au pouvoir pendant longtemps. Je sais que beaucoup de chefs d'Etat Africain et des grands amis du continent reflechissent sur la question et certains devraient se retrouver d'ici peu pour elargir la reflexion sur l'impact de la confiscation du pouvoir politique sur les transitions democratiques dans notre continent, c'est a dire chercher aussi a savoir pourquoi cela a marche dans certains pays et pas dans d'autres.

Comment voyez-vous l'avenir du Cameroun a court, moyen et long terme ?

Je dirais qu'en depit des defis que les Camerounais rencontrent, et des difficultes materielles auxquelles sont confrontees les familles et les concitoyens, en depit de la conjoncture internationale qui est devenue tres feroce et tres competitive, je reste tres optimiste quant a l'avenir du Cameroun. Parce que je vois emerger au Cameroun une nouvelle generation des jeunes Camerounais qui aspirent a etre gouvernes autrement, Je rencontre aussi de professionnels Camerounais eparpilles partout a travers le monde et qui sont en train d'acquerir de nouvelles connaissances. Je suis persuade qu'une fois qu'ils auront la possibilite de ramener ces nouvelles connaissances et experiences pour se joindre aux compatriotes travaillant deja sur le terrain, notre pays sera vraiment enrichi et avec un systeme democratique qui nous permettra de mieux gerer nos ressources humaines et materielles, le Cameroun s'en sortira. Donc, je suis tres optimiste pour l'avenir du Cameroun. Je suis persuade que cet avenir sera meilleur surtout si la jeune generation et tous les ames de bonne volonte se battent pour que ce soit ainsi.

© Mutations